François Bégaudeau
François Bégaudeau

France 3 à l'Abbaye royale de Fontevraud, pendant les résidences

François Bégaudeau - auteur d'

vignette : Thierry Lounas, Capricci editions

François Bégaudeau, auteur d'Entre les Murs,
à l'abbaye de Fontevraud (49),
dans le cadre de la résidence Ecrire avec, lire pour

Ma-Tvideo France3 – vidéo de blevaillant



Entre les murs de Laurent Cantet a obtenu la Palme d'or au festival de Cannes.
François Bégaudeau est l'auteur du livre Entre les murs ;
il est également coscénariste avec Laurent Cantet de l'adaptation pour le cinéma,
ainsi que comédien (il y interprète son propre rôle)


Entre les murs, vivement octobre !

le blog profencampagne



On ne verra qu’à la rentrée le film de Laurent Cantet tiré du roman de François Bégaudeau Entre les murs (qui vient de paraître en poche), film qui vient de recevoir la Palme d’Or de Cannes.

Nous sommes nombreux au CRAP-Cahiers pédagogiques à avoir lu et apprécié la chronique savoureuse, douce-amère et très juste d’un collège d’un quartier défavorisé de Paris. Nous sommes certains, après avoir lu d’ailleurs dans plusieurs numéros du Monde de l’éducation une autre chronique : celle du tournage du film, que celui-ci nous montrera un visage de l’école autrement plus intéressant que celui qui ressortait de Etre et avoir, film certes attachant et réussi, mais présentant une vision suranné de l’école.

© DR

Le ministre vient de rendre hommage au film qui « constitue un très bel hommage rendu à tous les enseignants de France qui, malgré des conditions de travail parfois difficiles, font preuve d’un dévouement et d’un mérite exceptionnels qui doivent être salués ». Très bien, mais ce qui ressort du film n’est sans doute nullement l’échec d’une école soi-disant minée par le « pédagogisme » et qui donne trop la parole aux élèves, nullement une apologie du retour des blouses grises et de l’obéissance au maître qui sait tout. Pas plus qu’il n’est un éloge un peu fade de « l’admirable travail des enseignants ». Ce n’est sûrement pas « un film à thèse » et tant mieux !

Il faut lire ce qu’écrit Bégaudeau, avec la modestie qui est le propre d’un bon enseignant, tout le contraire de la morgue de ceux qui ne vont pas manquer de honnir le film (comme ils le font du livre sur des blogs). En particulier dans un dossier des Cahiers pédagogiques (n°445) où il a proposé une belle contribution (« le meilleur du pire des ZEP ») qui se conclut ainsi :

Il y a cependant une marque des élèves de ZEP, qui à mes yeux les discrimine positivement. Appelons cela leur frontalité. Là encore, il faut se rappeler l’ambiance morne qui régnait dans nos classes bourgeoises, où les mots d’ordre, pour tacites, n’en étaient pas moins strictement appliqués. Surtout ne pas participer. Surtout ne jamais lever le doigt. Même si on savait la réponse, a fortiori si on la savait. C’eût été afficher, et se nier comme rebelle en l’affichant, ce que nul n’ignorait, à savoir qu’entre les profs et nous existait une fondamentale connivence sociale par rapport à quoi on ne se démarquait que superficiellement, et par exemple en n’instituant aucune relation orale avec eux. En ZEP, tout le contraire. Les élèves ne ressentent pas le besoin de se distinguer d’un système qui de toute évidence (c’est fou ce qu’ils ont intégré cette conviction) n’a pas été conçu pour eux. Alors c’est souvent une forêt de doigts levés qui accueille les questions posées à la cantonade par l’enseignant, pour peu qu’elles ne soient pas complètement absconses. Parfois, la parole ne prend même pas la précaution d’en passer par le rituel immémorial du doigt. Ça donne des répliques inopinées, des interférences, des parasites, des dialogues de sourd, et pour tout dire un joyeux bordel. Et de fait, cette loquacité débridée relève de ce qu’un euphémisme ironique aime à appeler la « spontanéité » des élèves. C’est vrai : c’est le même élève « spontané » qui sauve votre cours de l’exposé unilatéral et un jour vous tutoie ou vous signifie qu’il se bat les couilles de vos réprimandes. Tout fonctionne en interface. C’est le prix à payer de la frontalité que de la voir, de loin en loin, se muer en affrontement. On ne peut pas vouloir le beurre et l’argent du beurre. On ne peut pas désirer l’animation et réprouver l’agitation, priser l’énergie et déplorer l’électricité.


On peut suivre aussi avec intérêt les interventions de François Bégaudeau dans une remarquable vidéo produite par Cap Canal sur les débuts dans l’enseignement.

Nous reparlerons du film cet automne et dores et déjà nous félicitions chaleureusement le réalisateur, l’acteur principal (qui est François Bégaudeau) et les 25 élèves de quatrième, si sérieux et de belle allure, dans leur sympathique diversité, sur la scène du Grand Palais des Festivals.


François Bégaudeau, Ouest-France

Vendredi 30 mai 2008
Ouest-France







François Bégaudeau : « Mes véritables racines familiales
sont à Saint-Michel-en-L'Herm (Vendée)
où ma famille a encore une maison. » : AFP



Auréolé de la Palme d'or remise à Entre les murs,
le film tiré de son livre, le Vendéen, qui y joue son propre rôle,
se considère d'abord comme un écrivain.


Entretien François Bégaudeau
Professeur, écrivain,
aujourd'hui scénariste et acteur,
est né loin de Cannes : à Luçon, en Vendée.



La Palme d'or, vous la vivez comment ?

Quand j'ai vu le gros « bordel » qu'elle a provoqué, j'ai décidé de ne faire aucune émission. J'ai refusé de partir en tournée. Juste après Cannes, je suis allé en résidence d'écrivain trois jours à Fontevraud. Ça m'énerve qu'on parle autant du film avant sa sortie. J'attends octobre pour voir ce que les gens en pensent vraiment.




Où avez-vous rencontré Laurent Cantet, le réalisateur d'Entre les murs, tiré de votre livre du même nom ?

Dans une émission de radio où j'étais venu parler du livre. Il m'a rappelé ensuite pour me proposer d'en faire un film où je jouerais mon propre rôle d'enseignant. Le roman était assez autobiographique, tiré de mon quotidien en tout cas. Il s'en est beaucoup inspiré, tout en apportant sa touche personnelle.





Est-ce que ce succès va changer votre façon d'écrire ?

Non. Des scénarios, j'en ai déjà écrit. Je sais que certains écrivains travaillent en pensant au cinéma, c'est plus lucratif. Mais quand j'écris, j'essaie d'écrire un bon livre, c'est tout. Je travaille actuellement sur deux livres qui paraîtront à la rentrée. Le premier, L'Antimanuel de littérature, est à la fois pédagogique et comique. L'autre est un pur roman dont le titre est encore secret.




Comment vous est venue la vocation d'écrivain ?

Quand je faisais mes études, comme tous les étudiants en lettres, j'avais déjà plus ou moins l'idée d'écrire. Ça s'est concrétisé. J'ai eu la chance d'être publié assez vite.




Vous vous êtes aussi intéressé au rock. Vous étiez chanteur dans le groupe « Zabriskie Point » et aimez, paraît-il l'équipe de Nantes de football...

Il ne faut rien exagérer ! J'ai chanté autrefois dans un groupe, mais c'est loin, tout ça ! Quant aux Canaris, c'est vrai, j'ai été supporter. Beaucoup moins maintenant car ce club n'a plus d'identité.




Revenons au cinéma. Vous avez aussi des liens avec le 7e art à La Roche-sur-Yon.

Six mois après ma rencontre avec Laurent Cantet, je l'ai retrouvé au festival yonnais En route pour le monde, consacré à l'aventure humaine. À la demande de Yannick Reix, son organisateur, je fais partie du comité de programmation. L'an dernier, en tant que critique aux Cahiers du cinéma, j'ai contribué aux débats.





Vous êtes écrivain mais vous êtes aussi engagé... à gauche.

Quand j'étais jeune, j'étais à l'extrême gauche. Maintenant à 37 ans, je suis de gauche. Vous savez, être de gauche, dans le milieu littéraire, ce n'est pas spécialement courageux. Je ne suis pas un de ces intellectuels qui montent sur leurs grands chevaux en toutes occasions. Par contre, j'essaie de fabriquer autant d'égalité et d'équité que possible en donnant accès à la parole et à la responsabilité pour tous.





Recueilli par
Marc LAMBRECHTS

"Que l'école devienne une usine à joie"

Courrier de l'ouest, 
le 29/05/2008


Bégaudeau écrit entre les murs… de Fontevraud

Ouest-France,
le 28/05/2008